Lui, au contraire, veillait – que ce fût en analysant le menu de la cafétéria ou en contemplant au bar les cubes de glace fondre dans son verre ; il veillait en avalant chaque matin, en sus de sa collation, deux ou trois longueurs de bassin et même – ce qui témoigne de sa conscience professionnelle – en feignant de courser la nuée de femelles en uniforme qui des- servaient les comptoirs. Sur qui veillait-il ? Sur quoi ? C’était justement le problème qu’il avait à résoudre L’affaire avait débuté, moins d’un mois auparavant, de la façon la plus fortuite. Un adolescent en scooter. qui contournait une place sur les chapeaux de roue, dérape sur le bitume humide et va donner de la tête contre les marches d’une fontaine publique. Lorsqu’on croit avoir pensé à tout pour protéger un secret. on ne pense pas toujours à l’accident. Ainsi, dans le cas qui nous occupe, on véhicule le jeune homme à hôpital.

on le palpe, on l’ausculte. on jette à tout hasard un oeil sur ses papiers et voilà qu’on découvre qu’il est porteur d’un plan d’insurrection armée ! La teneur du document ne surprend pas les spécialistes. En apparence. la situation sociale est calme, les masses se sont apaisées. Mats, à dire le vrai, elles récupèrent leur souffle tandis que les chefs de file se concentrent afin, peut-être, de s’unir et d’asséner au système un coup définitif.

quand on cuisina le garçon, Bursa assistait à la séance. Les interrogateurs. parfois, avaient la main lourde et, encore mal remis de ses émotions, le sujet passa graduellement aux aveux.

Oui, il appartenait au Mouvement. Oui, la révolution couvait.

Oui, on n’attendait plus, pour la déclencher, que l’approbation des plans par le coordinateur international.